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Le Caliborniot
Mon grand-père vivait à Elisabethville en région
parisienne. Il s'y était établi pendant la guerre afin d'accomplir ce que
l'on appelait le "retour à terre" et ainsi échapper au STO, le Service du
Travail Obligatoire en Allemagne. Pour faire vivre sa famille, il élevait
des poules, des lapins et des chèvres et cultivait un petit lopin de terre.
A l'occasion, il braconnait le lapin de garenne. C'est ainsi qu'un jour à
l'aurore, il rentrait chez lui tenant fièrement par les oreilles un
splendide lapin qu'il avait attrapé avec un collet.
Un soldat allemand venant en sens inverse exprima son
admiration. C'était probablement un de ces soldats allemands qui faisaient la
guerre malgré eux et cherchaient à entretenir de bonnes relations avec la
population civile française. Désireux d'améliorer ses connaissances
linguistiques, l'allemand pointa son doigt vers le lapin et demanda avec un fort
accent teuton: "Komment on dit en Français?"
Mon grand-père était d'un naturel taquin et répondit du
tac au tac:
"Caliborniot"
"Ka-li-bor-nio?"
"Oui caliborniot" reprit-il sur un ton didactique.
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Mon grand-père pendant son service militaire peu
avant la seconde guerre mondiale - photo collection Seconde-Guerre-Mondiale.com |
"Le Kalibornio ou bien La Kalibornio?"
"LE caliborniot" précisa mon grand-père
Et l'allemand, fort satisfait, poursuivit son chemin en
répétant consciencieusement "Kalibornio, Kalibornio, Le Kalibornio, Le Kalibornio..."
C'est ainsi que près de 70 années plus tard, le mot
caliborniot fait toujours partie du vocabulaire familial et lorsque nous nous
retrouvons en famille, nous mangeons souvent du caliborniot à la moutarde...
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